Pong musical : Ose – Adonia

Bon, alors là je suis embêté. Je suis désolé de le dire, mais je n’ai pas accroché… Alors je me suis accroché et j’ai écouté une nouvelle fois, puis encore une autre …. Et je n’ai toujours pas été conquis. Attendez, attendez, je dis que je n’ai pas été conquis, je ne dis pas que je ne le suis pas maintenant…. Je me suis dit que si le Furventesque me tendait cette perche musicale, je pouvais m’y accrocher. Cette perche ne pouvait que être solide, que m’y suspendre me ferait passer d’un rivage à un autre, et que derrière ce rivage se cachait un pays de vallées et de collines que je ne connaissais pas, un pays que Zéphyrin voulait me présenter.

Alors j’ai continué à écouter, et surtout j’ai arrêté de faire autre chose en même temps. Pas de mots fléchés, pas de mots croisés, pas de sudoku. Bref tous ces trucs sensés stimuler l’irrigation de mon cerveau afin de préserver ses fonctions malgré l’âge qui avance et qui réduit progressivement le nombre de neurones en état de fonctionner. Bon, je dis ça, mais en fait c’est plutôt que ça m’amuse de le faire. Pas d’objectif « Prévention de la Déchéance » derrière tout cela… À ce propos, j’ai récemment entendu que les dernières choses qui restent quand un cerveau croise Mr Alzheimer, et bien ce sont les émotions et la mémoire musicale…

C’est vrai que la mémoire musicale….Je vous ai déjà dit qu’il y a quelques années (décennies) j’enregistrai les vinyles des copains sur des K7 ? Oui, je vous l’ai dit… Ceux qui suivent s’en souviendront, ceux qui ne sont pas attentifs n’ont qu’à mieux réviser leurs leçons. Or donc il y avait trois problèmes principaux : Le premier, inévitable, était les craquements dus aux poussières, aux saphirs pour les « tourne-disques », ou diamants pour les « chaines », qui dérapaient en créant une belle rayure qui produisait un joli « clac-clac-clac » régulier de quelques secondes ou dizaines de secondes, ou au bras de lecture qu’on posait et reposait devant LE tube de l’album, et qui là encore pouvait laisser une trace en forme de « clac »… Le second, dû au réseau électrique, était la sonnette de l’épicerie d’à côté : à chaque fois que la porte s’ouvrait, et se fermait…., il y avait un joli parasite qui s’enregistrait. Donc, si on me prêtait un disque pour l’après-midi seulement, ce qui était assez courant, j’enregistrais un vinyle et des parasites plus ou moins nombreux selon la fréquentation de l’épicerie. Le troisième, était dû à mon tourne-disque : avant d’avoir ma chaîne (Dual, une marque Allemande…), j’ai tout enregistré en mono… Si vous vous attardez sur le mixage des années soixante, vous verrez que la mode était souvent de tout mettre au milieu, et les solos d’un seul côté… Si bien que j’ai en mémoire des chansons des Beatles sans les solos de droite, ce qui fait que quand je les écoute maintenant je suis surpris de leur présence… Comme je suis surpris de l’absence de craquement ou de parasites sur les premiers albums entrés dans ma mémoire musicale… Bref, si dans quelques années je vous soutiens que tel morceau des Beatles n’avait pas de solo de guitare, ce ne sera pas une manifestation de mauvaise-foi, ce sera juste les prodiges de la mémoire musicale…

Donc j’ai écouté et j’ai réussi à entrer dans la contrée qu’on voulait me faire visiter. Le Theremin du premier morceau avec un vibrato diablement efficace, la trompette, mais aussi les sons sur la fin du troisième morceau ont eu besoin de plusieurs écoutes pour qu’enfin je rentre dans cet étrange univers. L’étrangété de la voix, l’originalité des sonorités, la lenteur me sont alors apparues comme des éléments d’un paysage, certes différent, mais agréable et apaisant, propice aux divagations de l’esprit… Une bien belle proposition encore une fois. Déstabilisante, je l’ai déjà dit, mais qui vaut le coup de persévérer.

Alors à mon tour de proposer : quand, pour décrire Eos, Furvent Ier a parlé de nappes de synthé et de contrées désertiques, je me suis dit que j’avais ce qui conviendrait pour mon Pong. Plusieurs albums, plusieurs groupes, pouvaient convenir, mais c’est « Ose » qui s’est imposé avec l’album « Adonia ». Album de 1978, typique de ce que pouvait alors être ce qu’on appelait « Musique Planante ». Des synthés, des synthés et encore des synthés. Ce que détesteraient peu après les Punks.

Des synthés, oui, mais pas ceux des années 80, pas les DX7 de chez Yamaha avec leurs sonorités pré-réglées qu’on entend sur tous les tubes de cette époque, non, là c’est des Moog à foison, des ARP, des Oberheim, des synthés où les sons sont travaillés, profonds. Des synthés tous pleins de boutons, de curseurs et de petites lumières qui clignotent. Et puis une guitare. Le tout composé et orchestré par un français qui était aussi journaliste à « Best » ou « Rock & Folk », les deux magazines indispensables pour s’informer en cette époque lointaine et pré-internet. Un album où l’on prend son temps : les thèmes sont développés aussi longtemps que nécessaire, les intros prennent leur temps d’introduire, les couches se superposent lentement, avec précision. Un album à écouter « de préférence allongé, un casque sur les oreilles et en fermant les yeux », comme le dit le minot.

Bonne écoute à vous.

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